Résumé
de la traversée Panama/les Marquises (un peu d'indulgence
pour l'orthographe et les ponctuations c'est encore une fois écrit
avec le téléphone) je publierai un texte plus corrigé et une
compilation un peu plus tard pour ceux que ça intéressent
15 mars 2020, je commence à en
avoir ma claque du Panama, en plus de m'avoir complètement séché
avec leurs tarifs pour millionnaires, c'est une galère sans nom pour
avoir le Check-out et la clearance permettant de pouvoir sortir enfin
du pays. à cause du corona virus, les services portuaires et
d'immigration ne délivrent plus rien (à part bien sûr de lâcher
un bon billet, en ce cas, un fonctionnaire bien gras emprunte le
tampon du bureau et viens au bar d'à côté te faire les papiers
illégaux et anti datés (en plus il faut lui payer une Corona au
passage)) je ne suis décidément vraiment pas fait pour ça, je
décide de mettre les voiles en mode pirate sans autorisation
advienne que pourra...
Je serre un peu les fesses quand même
en quittant le mouillage, il y a la police du canal qui patrouille
sans arrêt et j'aimerais bien ne pas avoir affaire à eux une
nouvelle fois, j'essaie de me faire le plus petit possible (c'est pas
dur je sais) c'est plus fort que moi mais dès que j'entends le bruit
d'une vedette rapide je rentre encore plus la tête dans les épaules
dans l'espoir d'être encore plus discret (c'est un peu con c'est
vrai) Avec très peu de vent, je slalome entre les immenses cargos au
mouillage progressant tant bien que mal vers le large et la liberté,
en fin de journée, le vent et la nuit me font enfin disparaître du
royaume des policiers et des bandits, adios Panama ! à nous deux le
Pacifique ! ça fait un bout de temps que j'en rêvais de ce foutu
Pacifique, j'ai du mal croire que j'y suis enfin, c'est tout juste si
je me sens encore pisser tellement je suis content d'y être.
L' alizé redevient mon ami et me
pousse tranquillement vers l'archipel des Galapagos et vers
l'hémisphère sud (en fait je n'ai pas l'intention de m'arrêter aux
Galapagos où les autorisations d'escales sont fastidieuses, mais ça
fait tout de même un point de chute en cas de problème)
Après
dix jours de nave pépère, je rencontre la difficulté majeure de la
traversée: le pot au noir, c'est une zone carrément merdique situé
au niveau de l'équateur qui délimite les alizés de l'hémisphère
Nord et les alizés de l'hémisphère Sud (les intellos appellent ça
la ZIC zone intertropicale de convergences) ; les
vents y sont très faibles et de directions variables accompagnés
souvent de grains assez violents, au temps de la marine à voile
c'était le cauchemar des marins, on pouvait y rester encalminé des
semaines, de nos jours le pot au noir ne dérange plus grand monde,
un bon coup de moteur et quelques dizaines de litres de gas-oil et
hop l'affaire est réglée, il n'y a plus guère que pour les
coureurs au large et pour certains hurluberlus qui n'ont pas de
moteur où les difficultés sont encore présentes.
Finalement je m'en démerde pas trop
mal de cet enquiquineur de pot au noir mais il faut être vigilant
tout le temps pour ne pas se faire surprendre par un de ces fameux
grains qui peuvent descendre le mat ou déchirer la voile en un rien
de temps ce qui serait fâcheux pour le reste du voyage. Au bout d'à
peine trois jours à la barre sans pratiquement dormir, je passe sous
un magnifique double arc en ciel complet, porte de l'hémisphère sud
et des alizés du même nom, je vois déjà la Polynésie et les
vahinés me faire des grands signes, je suis à deux doigts de me
faire dessus tellement j'ai la banane.
En fait dès les premiers jours, les
difficultés commencent, le pacifique et l'hémisphère Sud ça se
mérite quand même un peu, je commence à avoir gravement besoin de
sommeil, mais je me fais enquiquiner pendant pratiquement deux jours
par une flotte de pêche qui n'arrête pas d'écumer la mer dans tous
les sens, m'obligeant à manœuvrer sans cesse pour les éviter, y'a
vraiment pas moyen d'être peinard, si c'était pour retrouver ça,
j'aurais mieux fait de rester naviguer en Manche ! Les bateaux
pissent la rouille de partout, certains n'ont pas de signal AIS et
mettent à l'eau d'immenses filets munis de bouées lumineuses, je
pense qu'il s'agit d'une flottille de chalutiers Chinois mais ça
pourrait être tout aussi bien des chalutiers péruviens ou
équatoriens.
Qu'elle horreur ! J'ai
dû m'endormir, mon Baluchon est couché sur le sable, j'ai beau le
pousser de toutes mes forces, il ne bouge pas d'un centimètre, il
est tout bonnement échoué, j'aperçois deux silhouettes sur la
plage, je fais des grands signes pour demander de l'aide, vu les
circonstances j'aurais bien aimé trouver deux rugbymen, mais en
l'occurrence c'est deux superbes filles en maillot de bain, l'une a
un fusil harpon sur l'épaule et l'autre tient un balaise de poisson
au bout du bras, je leur explique en polonais que j'aimerais bien
qu'elles m'aident à pousser mon bateau, avant de m'apercevoir que je
ne parle pas Polonais et qu'il est peu probable qu'elles le
comprennent en retour, je me remet à pousser le bateau avec l'espoir
qu'elles comprendrons ce que j'attends d'elles. C'est alors que la
fille au harpon me prend par la main et m' entraîne vers les dunes
toutes proches, sa copine me sourit et me fait un clin d'œil comme
si j'étais le plus beau mec du monde (rien que là ça aurait dû me
mettre la puce à l'oreille) on se dirige ensuite tous les trois vers
une sorte village composé de huttes d'où sort des dizaines d'autres
filles tout aussi bien gaulées que mes deux guides, ho la vache !
Au centre du village, la fille qui
me tenait la main m'attache à un poteau qui devait se trouver là
par hasard, toutes les filles se mettent alors à m'observer,
certaines me prennent en photo avec leurs smartphones où est dessiné
un étrange symbole, une sorte de pomme à moitié croquée, l'une
des filles, vêtue d'un tee-shirt rose bonbon où il est inscrit
shoping avec des paillettes me regarde comme si elle allait me
dévorer tout en faisant des bulles avec son chewing-gum et en
tournicotant une de ses couettes avec son doigt, je ne sais pas
pourquoi mais je commence à avoir très très chaud. Puis l'ensemble
des filles se mettent à chanter une sorte de complainte et
commencent à tourner en rond autour de moi.
AIDE NOUS À PAYER LES TRAITES DU
DERNIER MONOSPACE ET DE LA NOUVELLE MACHINE À LAVER.
Mon sourire jusque là béat
commence à baisser légèrement, d'autant que je m'aperçois que je
suis attaché super serré et que ça va pas être facile de se
sortir de ce merdier...
C'est alors que je me réveille en
sursaut, il me faut pas mal de temps pour comprendre que je ne suis
pas sur une île avec des filles super canon en maillot de bain mais
à l'intérieur de mon bateau qui danse la danse de Saint Guy au beau
milieu du pacifique, je hisse la tête dans un demi sommeil par le
capot pour voir: plus de chinois en vue, tout va pour le mieux.
Les jours se suivent ensuite
milles après milles en père peinard sans incident notoire , je
repense quelques fois avec nostalgie à l'île au filles, le reste du
temps je lis, j'écoute de la musique et des podcasts, c'est pas
vraiment la vie de galérien.
Mais je constate quand même que
jours après jours la distance parcourue quotidiennement diminue de
plus en plus, ça me contrarie un peu, en me baissant par dessus bord
je m'aperçois que la coque en entièrement recouverte d’anatifes
une sorte de mollusque caoutchouteux très dur à décoller, Doux
jésus ! ni une ni deux j'enroule la voile, enfile mon masque et mon
tuba et plonge pour gratter toutes ces horreurs de mollusques, au
bout d'une bonne heure d'effort je commence à retrouver une coque à
peu près propre, je remonte à bord assez satisfait de moi, et
recommence à vaquer à mes petites affaires quand j'entends un peu
plus tard un grand coup dans le gouvernail, que passa ? Puis un autre
coup, je me penche et je vois un requin qui essaye de chopper quelque
chose sous la coque il a l'air très énervé le garçon, il n'est
pas immense, dans les 2 mètres tout jaune avec des ailerons blancs,
il a l'air de s'intéresser très fort à quelque chose situé sous
le bateau mais même moi qui adore nager je n'ai aucune envie de voir
de quoi il en retourne, je n'ose même pas imaginer si j'étais tombé
nez à nez avec lui pendant ma séance de grattage, finalement je
décide que dorénavant je vais éviter de plonger, même si je met
quelques jours de plus pour traverser, c'est quand même moins
embêtant que d'avoir un bout de bras ou de jambe en moins.
Et puis finalement, comme ça
au bout de 44 jours de navigation qui m'a semblé plus ou moins
réelle, l'île d'Hiva Oa est apparue un beau matin en plein milieu
de l'océan , je me suis demandé sur le coup si c'était bien la
réalité (peut-être suite au souvenir d'une certaine autre île)
j'ai du mal a croire que j'y suis vraiment, il va me falloir sûrement
plusieurs jours avant de redescendre sur terre.
Arrivé au mouillage d'Atuana, je suis
super bien accueilli par les autres bateaux, ça fait plusieurs
semaines que suite au Corona virus, la Polynésie met les bateaux
entrant en quarantaine avec interdiction de descendre à terre
pendant 14 jours et interdiction de quitter l'île, une sorte de
solidarité s'est mise en place entre les navigateurs confinés, on
m'annonce la nouvelle mais on me dit que les mesures sont en train
d'être assouplies, on m'apporte de la nourriture ça tombe bien car
il ne me restait presque plus rien à manger à bord, des fruits, des
œufs de la bière bien fraîche, du chocolat le tout dans le plus
joli décor qui puisse être, cette fois c'est sûr je suis bien
tombé au paradis et il est bien réel celui là
:-)
Vidéos de Yann Quénet
Rencontre avec une mouette
L'arrivée est proche
Suite de l'aventure au prochain
épisode... Yann QUENET